Arte nous dévoile ce matin un reportage (que vous retrouverez ici en
Arte nous dévoile ce matin un reportage (que vous retrouverez ici en entier) horrifiant sur les thérapies de conversion proférées par les organismes religieux et médicaux qui prétendent « guérir » les personnes homosexuelles. Très courantes dans les années 70, elles continuent pourtant d’exister presque partout dans le monde et essentiellement en Europe.
L’infiltration anonyme des journalistes leur a permis d’enregistrer des images inédites
Polonais, allemands mais aussi français, des victimes et bourreaux de 5 pays différents témoignent à visage découvert dans cette enquête d’infiltration grâce aux journalistes qui signent ce reportage.C’est ainsi qu’en tant que téléspectateurs-trices, nous entrons en live dans les coulisses de mouvements français, tels que Torrents de vie, qui s’assimilent en apparence à des réunions des Alcooliques Anonymes aux allures sectaires, où la parole est remplacée par des séances de transes collectives.
Thérapies médicamenteuses à base d’antidépresseurs et d’hormones, lobotomies, électrochocs… telles étaient les pratiques médicales subies par les personnes homosexuelles dans les années 1970 aux États-Unis. La dépsychiatrisation de l’homosexualité a mis progressivement fin à ces pratiques mais a laissé place à des mouvements religieux qui prétendent guérir cette « déviance inacceptable » par des méthodes certes différentes, mais tout aussi violentes. Les associations les plus actives dans la prolifération de ces fausses thérapies sont les évangéliques d’Exodus ou les catholiques de Courage, présents aux quatre coins du monde à travers une sorte de réseau de franchises. Celles-ci tentent de convertir les homosexuels à l’hétérosexualité ou à les pousser à la continence (à savoir : s’abstenir de tout plaisir charnel).
En effet, les personnes homosexuelles que l’on entend sont rejetées par leur église, car celle-ci compare l’homosexualité à un démon que l’on doit exorciser. Chose que dénonce le théologue, Laurent Lemoine :
” L’exorcisme ne porte que sur la possession démoniaque, c’est donc une erreur et une faute de la part de l’Église que de proférer des exorcismes sur des personnes homosexuelles.”
Ces mouvements utilisent des discours de compassion et de déculpabilisation pour cacher leur haine véritable envers les personnes homosexuelles. Ils arrivent à convaincre leurs victimes qu’elles sont possédées par le diable, les forçant à jeuner pour expier leurs péchés, leur faisant parfois frôler la mort. A ce sujet, Bastian nous livre son journal intime dans lequel il explique ses 8 années de calvaire, de prières, d’exorcisme qui ont abouti à une tentative de suicide. Aujourd’hui, Bastian explique qu’il ne peut plus se dire croyant car “ses prières pour être accepté tel qu’il est n’ont jamais été entendues par Dieu”. Il n’est pas le seul : toutes les victimes, rongées par la honte et la culpabilité, reviennent de l’enfer et ont souffert ou souffrent encore de séquelles psychiques très graves : la haine de soi, l’alcoolisme, la dépression jusqu’aux tentatives de suicide.
On entend aussi le témoignage de Deb, la fille d’évangélistes de l’Arkansas homophobes, Jean-Michel Dunand, un animateur de communauté homosensible (définition Wikipedia : “qui est sensible à la cause homosexuelle et ses revendications, voire qui en est solidaire ou militant”) et transgenre qui a subi de lourds traumatismes suite à des séances d’exorcisme, ou encore Ewa, une polonaise qui a subi des décharges électriques en consultations chez un sexologue. Car oui, certains médecins s’avèrent complices de ces « guérisons forcées ». En caméra cachée, on entend un psy essayant de persuader le faux-patient se faisant passer pour une personne homo (le journaliste) qu’il sementirait à lui-même, et qu’en réalité lorsqu’il couche avec son partenaire masculin, il pense forcément à une femme. On entend une autre psy déclarer que son patient ne doit absolument pas se soumettre à des pratiques homosexuelles car elle les considérère comme violentes, et que ça serait mieux pour lui de se rapprocher des femmes et de leur douceur. Non non, vous ne rêvez pas.
Et ça continue… Gero Winkelmann, un médecin allemand assume publiquement que l’homosexualité est une maladie, qu’il soigne par antidépresseurs et qu’il fait faire rembourser par la sécurité sociale en justifiant que ses patients sont instables, ou pire, passibles de mettre en danger la vie d’autrui en propageant des maladies sexuellement transmissibles.
Si aucune plainte n’a jamais été déposée, le Parlement européen a voté une résolution en mars 2018 appelant les États membres à interdire ces « thérapies ». Jusqu’à maintenant, seul Malte a légiféré sur le problème.
Ce reportage nous rappelle que le combat pour l’acceptation de l’homosexualité dans notre société est loin d’être gagné. De nature optimiste, j’ai pourtant l’impression que nos messages médiatiques sont forts, que nous sommes descendus dans la rue pour revendiquer l’égalité des droits homo, que des personnalités fortes ont pris la parole, que de plus en plus de marques et d’entreprises s’imposent comme « gay friendly ». Mais, en vérité, ce n’est pas suffisant. Les agressions anti-homo sont toujours aussi courantes, le poison vient de l’intérieur (la famille, l’éducation, les valeurs religieuses) au sein même des foyers, de certains mouvements religieux et même de cabinets médicaux. Engageons nous. Plus fort.
A ce sujet, voir aussi :